La littérature algérienne de l’assimilation
« De façon générale, les premiers romans algériens apparaissent aux alentours des années 20 et 30, cette période est souvent nommée, par les critiques, une période d’assimilation, d’acculturation et de mimétisme car les Algériens ont suffisamment appris la langue française pour se retrouver en contact direct avec sa culture en produisant des œuvres littéraires imitant celles des écrivains français. En effet, la politique scolaire coloniale avait, dès 1881, exposé le colonisé aux phénomènes d’assimilation, d’acculturation ou de mimétisme. L’assimilation de la langue et de la culture de l’autre se faisait en procédant au contrôle sévère des écoles coraniques et à l’élimination de la langue arabe ainsi que toute la culture maghrébine. À ce sujet, A. Lanasri souligne que « la répression se manifeste par (…) la destruction ou la fermeture des mosquées et des zaouïas (…) face à ses contraintes, la littérature se replie dans l’espace culturel de l’oralité et se manifeste dans la langue de tous les jours : l’arabe dialectal ou le berbère, pour atteindre l’auditoire populaire ». 15 Face à ces conditions, les Algériens n’avaient que la langue française qu’ils maîtrisaient parfaitement pour créer des œuvres littéraires et cette période située entre 1920-1945 est souvent nommée période d’exercice. »[1]
Voici les titres de romans illustrant cette écriture :
Khadra, danseuse des Ouled Naïl de Slimane ben Brahim
Ahmed ben Mustafa, goumier de Caïd ben Cherif, Zohra
La femme du mineur d'Abdelkader Hadj-Hamou,
Mériem dans les palmes de Mohammed Ould Cheikh
La littérature algérienne des années 50
Durant les années 50, émerge en Algérie une littérature qui sera désignée par la suite comme ethnographique[2]. Représentée essentiellement par les romans des précurseurs tels Le Fils du Pauvre (1950) et La Terre et le Sang (1953) de Mouloud Feraoun, La Grande Maison (1952) de Mohammed Dib et La Colline oubliée (1952) de Mouloud Mammeri.
- Cette littérature qui glisse vers l’autobiographie tente de réhabiliter l’indigène en lui restituant sa dimension humaine et en balayant l’image stéréotypée qui lui a longtemps collé dans les écrits coloniaux. « Il y avait, dans la littérature coloniale, une image de ce qu›on appelait « l›Arabe » ou « l›Indigène », une image tellement rebattue qu›il ne venait à l›idée de personne qu›elle pût être autre. En schématisant un peu, on peut dire que les Algériens étaient, dans les meilleurs des cas, des éléments de décor et, dans le pire, des modèles conventionnels et toujours péjorés. Ou la carte en couleurs pour touristes en mal d’exotisme, ou l’artefact raciste et freudien » (Mammeri, 1987 : 20)
- Elle est de nature descriptive : On y trouve principalement des descriptions de la vie traditionnelle, du folklore, des coutumes et des mœurs des Algériens. Ces descriptions servent à démontrer que l’indigène n’est pas un sauvage barbare mais un être ayant sa propre culture, un être avec un mode de vie et de fonctionnement différent « dépeindre un paysage, ceux qui l’habitent, les faire parler comme ils parlent, c’est leur donner une existence qui ne pourra plus leur être contestée. On pose le problème en posant l’homme » (Dib, 1985 : 10)
- A la différence de la littérature dite des assimilés, cette littérature est anticoloniale. Elle développe un discours contestataire latent à travers la description des misères, des conditions de vie difficiles et de la souffrance du peuple sous l’occupation française.
- Cette littérature propose une écriture réaliste ancrée dans le terroir. Ses techniques et ses effets rappellent ceux des romans classiques occidentaux, résultat de l’impact de la formation scolaire sur ces auteurs.
- La littérature des années 50 est évidemment produite en langue française qui était la seule alternative offerte aux écrivains de l’époque :
« Au départ, le choix des intellectuels algériens de la langue française comme moyen d’écriture leur a été commandé par les circonstances puissantes de la domination coloniale. Comme ils étaient tous formés à l’école française, ils étaient incapables d’écrire dans une autre langue que le français : « Pour moi, Algérien, je n›ai pas choisi le français. Il m›a choisi, ou plutôt il s›est imposé à moi à travers des siècles de sang et de larmes et à travers l›histoire douloureuse de la longue nuit coloniale. » (Boudjedra, 1995 : 25)
[2] La littérature ethnographique renvoie à cette écriture marquée par le souci de présenter une ethnie à un lectorat étranger, à travers la description de sa culture, ses mœurs, ses us, coutumes, traditions et mode de vie.
- Enseignant: soumia aounallah
- Enseignant: soumia aounallah
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